Les enfants abandonnés
En septembre 1998 Unicef chiffrait à 3 millions
les enfants dans les institutions d'État de Russie et des pays
d'Europe de l'Est. Ces "orphelinats" ne comptent que 1%
d'orphelins. Les enfants dans ces institutions sont en fait des
enfants abandonnés par leurs parents, provisoirement ou
définitivement. Ces enfants ont été abandonnés pour la plupart
au moment de la naissance ou à l'âge
de la scolarisation, autour de 4 - 5 ans. Ils proviennent
de familles dites déstructurées, monoparentales, à faibles
ressources.
Fruits d'un système communiste où la mère
patrie prenait en charge les enfants de familles défaillantes ou
les enfants anormaux dits irrécupérables, ils sont aujourd'hui le
fruit de la "transition économique" de ces pays. Le taux
d'abandon augmente de 3% chaque année.
Parmi ces pays, la Roumanie est sans conteste
le pays où le nombre d'enfants abandonnés en institution est
proportionnellement le plus élevé : 147 000 enfants se trouvent
aujourd'hui dans des "centres de placement" (pour enfants
dits normaux) et des "camin spital" (pour enfants à
handicap physique ou mental). Ce pays de 25 millions d'habitants
compte plus de 600 orphelinats répartis sur tout le territoire.
Ce taux d'enfants en institution s'explique par
l'histoire de la Roumanie, ex-pays communiste, qui a subi la
dictature de N. Ceaucescu, de 1965 à 1989. Souhaitant augmenter
rapidement la population de son pays, il a mené une politique
nataliste forcenée : interdiction de l'avortement, obligation de 5
enfants minimum par femme en âge de procréer, prise en charge par
l'État des enfants non désirés ou dont les familles ne peuvent
subvenir à leurs besoins.
Les orphelinats d'Etat
Les
orphelinats ont vu le jour dans les années 70 dans un contexte de
propagande de mère patrie nourricière et de création d'un homme
nouveau. Situé de préférence à la campagne, le personnel
recruté est composé essentiellement de femmes non-qualifiées des
villages alentours.
Pendant que la télévision d'État diffuse des
images idylliques,
les enfants souffrent massivement des syndromes d'hospitalisme
(syndrome de carence affective) en plus de la malnutrition :
balancements, psychose, autisme. Le taux de mortalité est important. Pourtant, sûres que l'État s'en occupe bien, les mères
continuent d'abandonner leurs enfants, parce qu'elles sont pauvres
ou que l'enfant a un handicap (qui peut se résumer à un simple
strabisme) et bien souvent n'ont plus aucune nouvelles d'eux, soit
parce qu'elles ne reviennent plus, soit parce que très souvent
l'enfant a changé d'institution et de département. La société
communiste a porté à mal les liens familiaux et parmi eux le lien
mère-enfant, pilier traditionnel de la famille.
Des moyens insuffisants
La création
d'un secrétariat à la protection de l'enfance, représenté par
monsieur C. Tabacaru, formé pendant huit ans par une ONG française,
fût à l'origine des grands changements dans le domaine de la
protection de l'enfance en Roumanie incarnés par la loi de juillet
1998 qui mit en place le système de DDASS dans chaque département
avec la volonté de replacer chaque enfant abandonné en famille
d'origine, d'accueil ou d'adoption et donc à terme de vider les
institutions d'État.
En attendant des services alternatifs devront être
développés (crèches de jour, foyers jeunes mères, etc.) afin de
maintenir le lien familial et de prévenir l'abandon au maximum.
Depuis janvier 2000, la nouvelle Agence pour la
Protection de l'Enfance, née de la volonté européenne, met en
place une stratégie globale de protection de l'enfance qui comprend
deux axes principaux de désinstitutionnalisation et de prévention
de l'institution. Si cette loi en théorie est idéale et pose
comme objectif la fermeture des orphelinats roumains en 10 ans,
force est de constater que la Roumanie n'a pas encore actuellement les
moyens de sa mise en oeuvre, moyens financiers, techniques et
humains.
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